Silvia Clergeot, locataire d'un appartement depuis 25 ans, exprime un sentiment de trahison. "Pour moi, les factures avec le détail des charges, c'est du chinois. Alors, je fais confiance et je paye parce que je dois le faire. J'étais choquée en apprenant ce qu'il se passait. Je ne pensais pas avoir à tout vérifier" confie-t-elle à la journaliste de France 3. Elle n’est pas la seule. La CLCV de Besançon contrôle régulièrement les charges chez les bailleurs du Doubs et conteste depuis 2021 les sommes réclamées auprès des locataires au titre des charges récupérables. Après des années de négociation sans succès, la CLCV de Besançon a décidé de passer à l’étape supérieure : l’action en justice.
L’origine du préjudice concerne deux postes clés dans les charges : l’enlèvement des encombrants et le salaire du gardien.
Dans le cas des encombrants, le bailleur Habitat 25 facture le stockage et l’enlèvement des encombrants aux locataires des résidences concernées. Or, le stockage et l’enlèvement des encombrants ne peuvent être considérés comme des charges récupérables, quand bien même ils seraient réalisés par le gardien ou l’employé d’immeuble dans le cadre de l’élimination des rejets, car les encombrants relèvent du rôle de la collectivité locale. Cette interprétation est confirmée par une décision de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation du 15 mai 2008. Elle fait jurisprudence et n’a pas été contestée depuis cette date.
Concernant le gardien, le préjudice concerne la récupération de son salaire à hauteur de 75 %. En effet, selon les tâches réalisées (nettoyage des parties communes et élimination des rejets via la sortie des poubelles), son salaire est récupérable auprès des locataires à hauteur de 40 % (une tâche effectuée), de 75 % (deux tâches effectuées) ou 0 % (aucune des deux tâches effectuées). Or, dans de nombreuses résidences, le gardien n’effectue pas les prestations prévues autorisant une récupération à 75 %. La CLCV a pu constater cette situation dans de nombreuses résidences, et estime le préjudice total de ces deux infractions à 500 000 euros.
Elle a à ce titre informé la presse, notamment l’Est Républicain et France 3. Le bailleur évoque uniquement une « divergence d’interprétation sur le calcul des charges récupérables » et « il apparaît que certaines sommes n’auraient pas dû être refacturées aux locataires, tandis que d’autres auraient dû l’être et ne l’ont pas été. Le solde sera ainsi défalqué des charges des locataires. » Cet argument n’est pas entendable, car le bailleur essaye désormais de refacturer d’autres charges non récupérables telles que les ampoules pour compenser son manque à gagner, selon la juriste de la CLCV, Léa Demontis. La CLCV prépare donc une assignation collective contre le bailleur pour obtenir le remboursement des charges indues. Une vingtaine de locataires a déjà rejoint la procédure, et la CLCV espère que la médiatisation de l’affaire pourra convaincre les autres habitants de la rejoindre afin de faire entendre au bailleur l’ampleur du préjudice subi.
La CLCV nationale soutient cette action de la CLCV de Besançon et appelons les autres structures CLCV à faire de même dès lors que des charges indues sont réclamées aux locataires.
Crédit photo : © Solo - stock.adobe.com