Les nitrites, c’est quoi ?

Les nitrites et les nitrates sont utilisés sous forme d’additifs alimentaires. Présents en France dans le secteur alimentaire depuis 1912, ce sont des agents de conservation que l’on utilise dans certains processus de fabrication. Ils servent à conserver les aliments plus longtemps, à limiter les risques de développement microbien notamment les bactéries responsables du botulisme, de la listériose et de la salmonellose, et permettent de fixer la couleur des aliments (ils sont à l’origine de la couleur rose des charcuteries cuites). « Ils sont indiqués sous les noms de nitrite de potassium (E249), nitrite de sodium (E250), nitrate de sodium (E251) et nitrate de potassium (E252). On les retrouve aujourd’hui dans plus de 15 000 produits emballés sur le marché français et en particulier dans les charcuteries crues (jambon sec, jambon cru…) et cuites (jambon blanc, rillettes, pâtés, saucisses…) », explique l’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE).

« Les additifs nitrites/nitrates sont autorisés dans les viandes transformées, charcuteries et certains fromages et poissons. On trouve également des nitrates naturellement dans les fruits et les légumes, l’eau et le sol. Ces derniers peuvent être convertis en nitrites dans notre organisme après ingestion, sous l’effet de bactéries buccales. », ajoute Selma Amimi, chargée de mission alimentation et développement durable de la CLCV.

Quels impacts sur la santé ?

« C’est la formation de composés nitrosés qui aurait un impact négatif sur la santé. Lorsque les nitrites sont ajoutés à la viande et ingérés dans l’organisme, ils sont transformés en composés appelés nitrosamines, dont certains sont classés comme cancérigènes pour l’homme. C’est pour cette raison qu’en 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé la viande transformée (jambon, viande en conserve, …) dans la catégorie des aliments présentant un risque cancérigène pour l’homme. D’après les chiffres de Santé publique France, 63 % des adultes dépassent la quantité maximale de charcuterie recommandée (150 g par semaine). Les Français sont donc particulièrement exposés » explique Selma Amimi. Elle précise que : « Selon l’ANSES, il y aurait une association entre le risque de cancer colorectal et l’exposition aux nitrites et/ou aux nitrates, qu’ils soient ingérés par la consommation de viande transformée, ou via la consommation d’eau de boisson.L’analyse de données de l’étude NutriNet-Santé a aussi permis à des chercheurs de mettre en évidence qu’une exposition alimentaire aux nitrites est associée à un risque accru de diabète de type 2. »

Comment limiter les risques ?

Afin de limiter l’exposition aux nitrites et nitrates, il est recommandé de limiter sa consommation de viande rouge (bœuf, agneau, porc principalement) et d’avoir une alimentation variée et équilibrée en consommant au moins cinq portions de fruits et de légumes par jour d’origine différente.

Le programme national nutrition santé (PNNS) recommande de réduire sa consommation de charcuterie à 150 g par semaine (soit 3 tranches de jambon) et la viande hors volaille à 500g par semaine. Pour les enfants, en dehors du jambon blanc ou de la volaille de temps en temps, la charcuterie ne doit être consommée qu’exceptionnellement.

Peut-on interdire totalement l’ajout de nitrites ?

« L’ajout de nitrites permet d’éviter le développement de bactéries comme les salmonelles, la listeria et le Clostridium botulinum, le bacille à l’origine du botulisme. Il y a donc un réel enjeu de santé publique. Interdire totalement l’ajout de nitrites implique une maîtrise parfaite du risque sanitaire. La CLCV milite pour une interdiction totale car les professionnels savent s’en passer grâce à des pratiques rigoureuses et une surveillance renforcée. On retrouve d’ailleurs aujourd’hui une large gamme de jambons sans nitrites dans les rayons des supermarchés. Pour y parvenir, les industriels jouent notamment sur la teneur en sel ou remplacent le sel nitrité par du sel de mer, qui est un conservateur naturel. L’absence de nitrites se traduit alors par une différence de couleur (jambon gris) mais également par une conservation moins longue et une teneur en sel qui peut être plus élevée. », rappelle Selma Amimi.

Attention aux alternatives 

Les emballages promettent parfois une alternative qui n’en est pas vraiment une. « C’est le cas des produits « marketés » sous la mention « sans nitrites ajoutés » ou « conservation sans nitrites ». Certains industriels remplacent dans la charcuterie les nitrates ou les nitrites ajoutés en tant qu’additif alimentaire par des extraits végétaux ou des bouillons de légumes pouvant être sources de nitrates naturels, lesquels sont convertis en nitrites sous l’effet de bactéries. Le consommateur est donc toujours exposé et ces produits ne représentent pas une alternative réelle. Tout dépend finalement des produits. Il y a certains produits de charcuterie où il est plutôt simple de supprimer totalement les nitrites sans avoir recours à d’autres ingrédients, et d’autres produits où le maintien de la sécurité sanitaire est plus compliqué, mais reste possible si les moyens nécessaires sont mis en œuvre par les fabricants. », explique Selma Amimi.

Les pays qui cherchent à les limiter

La France est avec le Danemark, le pays européen où les doses autorisées d’incorporation de nitrites dans les charcuteries sont les plus faibles en Europe. Au Danemark, le taux de nitrites a été abaissé à 60 mg/kg, avec des dérogations pour le jambon cuit ou le bacon aux teneurs plus élevées.

Quant à la France, « les fabricants et professionnels de la charcuterie doivent se conformer au code des usages de la charcuterie, de la salaison et des conserves de viande dans lequel des valeurs réglementaires sont fixées pour les nitrites. En 2023, ce code a fait l’objet d’une mise à jour afin d’intégrer les nouvelles teneurs de nitrites/nitrates autorisées à la suite de la publication du plan d’action pour la réduction des nitrites et nitrates dans les aliments. Les doses autorisées pour les produits de la charcuterie comme les lardons, saucisses cuites, pâtés, rillettes sont plus faibles que celles fixées dans le règlement européen. Par exemple, pour le jambon cuit, la dose maximale de nitrites de sodium autorisée aujourd’hui est de 90 mg/kg, alors que la réglementation européenne, la fixe à 150 mg/kg. », indique Selma Amimi.

Quelle est la différence entre les nitrites et les nitrates ?

Les nitrates sont les constituants naturels des végétaux et sont essentiels à leur développement. On en retrouve aussi dans l’eau et les sols suite à des processus naturels associés au cycle de l’azote, aux activités agricoles (épandage d’engrais azoté, effluents issus de l’élevage), aux rejets d’origine urbaine ou industrielle. Les nitrates se retrouvent naturellement dans notre alimentation, mais ils peuvent également être ajoutés dans les charcuteries ou certains fromages sous forme d’additifs alimentaires.

Les nitrites proviennent de l’oxydation naturelle de l’azote. Leur présence dans notre alimentation provient principalement de leur ajout, en tant que conservateur et antimicrobien, dans les charcuteries.

Crédit photo : ©kotoyamagami  - stock.adobe.com