De l’exception au principe

La loi « Habitat dégradé » a réécrit et complété l’article 42-1 de la loi du 10 juillet 1965. Celui-ci dispose : « Les notifications et les mises en demeure sont valablement faites par voie électronique. Les copropriétaires peuvent, à tout moment et par tout moyen, demander à recevoir les notifications et les mises en demeure par voie postale. Le syndic informe les copropriétaires des moyens qui s'offrent à eux pour conserver un mode d'information par voie postale. » Le recours à la notification par voie électronique est donc automatique, mais les copropriétaires peuvent demander à conserver l’envoi postal. Sur ce point, le nouvel article 42-1 est extrêmement large puisque cette demande peut se faire « à tout moment et par tout moyen ». Un simple mail, voire un sms, pourraient donc suffire, même si ces modes de communication peuvent poser problème au regard de leur force probante. C’est pourquoi il peut être conseillé de recourir au courrier recommandé, bien que cela ne soit pas imposé.

Le texte précise également que le syndic est tenu d’informer les copropriétaires des moyens qui s’offrent à eux pour conserver un mode d’information par voie postale. Or, l’article 42-1 n’apporte aucune précision sur les moyens permettant d’assurer cette information ainsi que son contenu. De plus, il n’est prévu aucun décret d’application, ce qui ne manquera pas d’être problématique, d’autant que les articles 64-2 et suivants du décret du 17 mars 1967 traitent précisément de la notification électronique, mais naturellement sous l’empire de l’ancienne règlementation. Si certaines dispositions demeureront sans doute inchangées (l’obligation de recourir à un prestataire de confiance qualifié par exemple), d’autres sont désormais caduques, à l’instar de celles relatives aux démarches que doit accomplir un copropriétaire pour recevoir ses notifications par voie électronique. La question se pose donc de savoir s’il est possible pour un syndic de se prévaloir de ces nouvelles dispositions.

La mise en place de la notification électronique 

En l’absence de décret d’application, les dispositions d’une loi ne peuvent recevoir application (1). Or, comme indiqué précédemment, l’article 42-1 ne renvoie à aucun décret d’application. Par ailleurs, rien ne s’oppose à l’application immédiate d’une disposition législative dès lors que son entrée en vigueur n’est pas subordonnée à celle d’un décret et à la condition qu’elle soit suffisamment précise (2) De fait, les syndics peuvent-ils imposer la notification électronique ? Comme le sage le dit parfois, il peut être urgent d’attendre. Pourquoi ? Tout d’abord, les dispositions du décret du 17 mars 1967 relatives à la notification électronique sont encore présentes et doivent être adaptées à la nouvelle situation. Ensuite, les moyens par lesquels le syndic informe les copropriétaires des possibilités s’offrant à eux permettant de continuer à bénéficier de l’envoi postal doivent être précisés. Si l’on peut légitimement imaginer un certain parallélisme avec une reprise des dispositions du décret n° 2015-1681 du 15 décembre 2015 sur l'information des occupants des décisions prises par l'assemblée générale (affichage dans les parties communes…), encore faut-il qu’un texte le prévoie expressément en matière de notification électronique. Enfin et surtout, aucune disposition ne précise par quels moyens le syndic va s’enquérir des adresses électroniques des copropriétaires. Et le fait qu’il en possède certaines ne peut présumer de la volonté du copropriétaire concerné de sa volonté de recevoir de façon dématérialisée les différentes notifications.

De fait, pour les syndics aventureux pressés de recourir, par simplicité (et souci d’économie), à l’envoi dématérialisé des notifications, notamment des convocations aux assemblées générales, il parait indispensable de procéder au préalable à une information la plus large possible auprès des copropriétaires de l’évolution de la règlementation. De plus, au regard de la rédaction de l’article 42-1, le syndic ne pourra pas imposer un formalisme particulier (envoi obligatoire en LRAR dans un certain délai par exemple), le droit du copropriétaire d’opter pour une notification postale pouvant se faire à tout moment et par tout moyen. Le plus simple, dans l’attente de la publication de futurs décrets, serait tout simplement de reproduire les dispositions de l’article 42-1 et de rappeler les adresses postales et électroniques du syndic afin que les copropriétaires puissent se rapprocher de lui. A défaut, la question pourrait se poser de la validité d’une notification électronique alors que les copropriétaires n'ont pas été en possibilité de demander à continuer à bénéficier de l’envoi postal.

Enfin, certains professionnels, trop impatients, ont déjà montré leur volonté de recourir à la convocation électronique à l’assemblée générale, quitte à passer en force et à indiquer aux copropriétaires récalcitrants qu’ils supporteraient alors individuellement le coût du recommandé. Un raisonnement bien étrange d’autant que sous l’empire de l’ancienne règlementation, il ne serait venu à l’esprit d’aucun syndic d’exonérer des frais de convocation les copropriétaires qui avaient opté pour la voie dématérialisée. On rappellera donc que les frais de convocation de l’assemblée générale constituent des charges générales conformément à l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, etr qu’ils sont donc répartis entre tous les copropriétaires (3)

(1) Cass. 3ème civ., 7 octobre 2004, n° 02-50.049. (2)Cass. 3ème civ., 12 mai 2016, n° 15-12.120. (3) Cass. Civ. 3ème, 12 novembre 2020, n° 19-22.060.

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