De notre longue expérience d’accompagnement des consommateurs, du traitement des litiges et d’une douzaine d’actions en justice engagées en la matière, nous pensons que le tarif réglementé doit garder la place prépondérante qu’il a aujourd’hui et qu’il doit aussi devenir plus protecteur

Aujourd’hui, 59 % des particuliers sont au tarif réglementé et 70 % sont restés chez EDF. En outre, ces proportions sont assez stables depuis 3 ans, comme le souligne la commission de régulation de l’énergie (CRE), ce qui semble témoigner d’une certaine maturité du marché.

17 ans après l’ouverture du marché la popularité du tarif réglementé est indéniable. Elle s’explique par deux facteurs :

  • Une formule de calcul qui, en soi, lisse les à-coups du marché de gros et qui est stable dans sa conception (même si ce caractère est précarisé par l’action du régulateur et de l’État sous l’effet des textes communautaires).
  • Une sécurité contractuelle radicalement plus élevée que celle de ses concurrents. Dans un marché devenu très toxique, nous ne constatons pas de pratiques commerciales déloyales significatives sur ce tarif.

Il faut ensuite comprendre que la plupart des consommateurs peuvent, à la rigueur, s’intéresser à des offres concurrentes mais n’ont visiblement pas envie de suivre le devenir d’une offre une fois souscrite. Or, dans notre activité de police de marché, nous avons pu constater que les fournisseurs alternatifs modifient très régulièrement leurs tarifs et leurs conditions contractuelles.

Plus encore, il apparaît que dans les cas où le tarif de l’offre d’un fournisseur alternatif est considérablement augmenté (+ 30 %, + 40 % voire plus 100 %) la prévenance du consommateur a peu d’impact : souvent, environ les trois quarts seulement ouvrent le mail qui prévient de la hausse et, après six mois, la moitié seulement quitte une offre pourtant devenue bien plus chère que le marché

Cette trop faible mobilité illustre à quel point il est préférable et rationnel que la majorité des consommateurs restent au tarif réglementé de vente car il n’est pas dans leur intérêt de souscrire à des offres qui nécessitent une forte vigilance tout au long du contrat.

Autant de considérations sur la réalité du marché de détail qui a complètement échappé à l’Autorité de la concurrence. Cette dernière, dans un essai théorique d’une grande faiblesse technique, vient de préconiser une disparation du tarif réglementé qui, à l’évidence, ne doit être en aucun cas envisagée.

La CLCV plaidera auprès de la Commission européenne pour le maintien du tarif réglementé.

Mais nous souhaitons aussi que la formule de calcul soit clarifiée et rendue plus protectrice. Au nom du principe de contestabilité, le régulateur et le Conseil d’État ont considéré que tous les fournisseurs alternatifs, soit une trentaine, qu’ils soient ou pas sérieux et solides, doivent pouvoir être moins chers que le tarif réglementé

Cette approche a induit de très fortes hausses du TRV depuis 5 ans parfois au détriment du consommateur (hausse du prix) parfois du contribuable (le bouclier tarifaire mobilisé pour éviter aussi ce type de hausse). Régulièrement le tarif réglementé a été l’otage de conflits dans la filière (autour des droits nucléaires notamment, connus sous l’acronyme Arenh) et la variable d’ajustement a été de hausser le tarif réglementé.

17 ans après l’ouverture, nous considérons que le marché est arrivé à maturité et qu’il n’a pas lieu de toujours privilégier la concurrence ou de régler les conflits de la filière en augmentant ce tarif.

Nous proposons la modification du système de calcul du tarif réglementé pour qu’il corresponde seulement au coût complet du système électrique français opérationnel.

Cette proposition a été reprise dans la proposition de loi sur le blocage des prix de l’énergie par un article 2 qui a notre plein soutien. Cet article, après avoir été largement voté en commission, sera examiné en séance plénière demain.


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