"Bonjour, Charles Bonimenteur de la société EnerJ’aptipri, fournisseur d’énergie. Vous êtes bien Mme X ? Que diriez-vous de payer moins cher votre électricité en souscrivant notre nouvelle offre… ». Energie, abonnement téléphonique ou changement de fenêtre… Nous recevons en moyenne chaque mois 15 appels de démarcheurs à domicile*. Le démarchage téléphonique est encadré par le Code de la consommation. Malheureusement, au bout du fil, tous les démarcheurs ne suivent pas les règles : donner son identité, l’objet commercial de son appel et les caractéristiques de ce qu’il vend dès le début de la conversation. Sans compter certains « professionnels » qui utilisent des pratiques commerciales trompeuses afin d’extorquer un consentement en usurpant l’identité d’un interlocuteur habituel ou en inventant une pseudo-nouvelle réglementation. Face à ses abus, la loi est venue protéger les consommateurs. Mais selon le bien ou le service acheté, la protection est plus souple.
Quand vos paroles vous engagent
Le consommateur n’est engagé par l’offre du démarcheur qu’après l’avoir reçue puis signée par écrit ou par voie électronique (liens cliquables ou codes SMS envoyés par les professionnels après le démarchage). Là où le bât blesse, c’est que cette réglementation ne s’applique pas aux démarchages téléphoniques des produits financiers (assurance, banque). Dans ce cas, contrairement aux autres biens et services, prononcer un simple oui au cours de la conversation vous engage comme une signature ! « Vous bénéficiez donc d’une meilleure protection en souscrivant un abonnement téléphonique qu’en souscrivant une assurance » s’insurge Olivier Gayraud, juriste à la CLCV.
Les complémentaires santé en ligne de mire
Nous accueillons dans nos permanences des consommateurs qui, après avoir été démarchés, se retrouvent engagés dans un contrat qu’ils n’ont pas souhaité souscrire ou qu’ils n’ont pas compris souscrire. Nous avons constaté qu’un produit est particulièrement touché : la complémentaire santé. Quant aux victimes, il s’agit souvent de personnes âgées. C’est le cas d’une adhérente de la CLCV du Loir et Cher, Mauricette, 82 ans. En février dernier, elle reçoit un appel pour lui proposer une mutuelle. Lors de la conversation, le courtier lui demande « pour la mise en place du contrat au 1er janvier 2020, êtes-vous d’accord avec ce que je vous ai proposé ? » Question à laquelle Mauricette répond : « oui, c’est quand même intéressant, si c’est vraiment valable comme vous me l’avez annoncé ». Plusieurs jours plus tard elle reçoit un certificat d’adhésion avec un échéancier. Notre adhérente n’avait pas compris qu’elle s’était engagée. Elle contacte la CLCV. Après plusieurs courriers à l’organisme de santé, notre antenne locale a obtenu l’annulation du contrat.
14 jours pour se rétracter
À la suite d’un démarchage téléphonique, vous avez 14 jours pour exercer votre droit de renonciation au contrat. Ce délai court à compter de la date de conclusion du contrat, le jour de l’appel téléphonique. Certains courtiers mal intentionnés font en sorte que le consommateur ne reçoive les documents qu’à une date très proche de la fin du délai, pire qu’une quinzaine de jours plus tard afin de ne pas vous offrir la possibilité d’agir. Lorsque le délai de rétractation est passé, il est difficile de contester le contrat. Seul l’enregistrement de la conversation prouve l’accord. Il est souvent inaccessible, voire inexistant. Il est alors fréquent que le professionnel fasse la sourde oreille. C’est pourtant à lui de rapporter la preuve du consentement au contrat.
Pour ne pas vous retrouver engagé malgré vous ou si vous êtes intéressé par le bien ou le service proposé mais ne souhaitez pas souscrire par téléphone, « il suffit de l’indiquer clairement à l’appelant en lui demandant l’envoi d’une version papier de l’offre. Il refuse ? Il y a fort à parier qu’il a quelque chose à cacher » rappelle notre juriste, « il faut se rappeler que l’on n’est jamais obligé de subir un démarchage téléphonique et qu’il est simple de mettre fin rapidement à un appel. »
La CLCV milite pour que la réglementation évolue afin qu’un simple accord verbal ne vaille plus acceptation et que seule sa signature manuscrite ou électronique engage le consommateur. Mais la résistance des assureurs et des courtiers est très forte quant à un changement de la réglementation actuelle.
*Enquête 60 millions de consommateurs (2015)
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