Alors même que l’encadrement des loyers devait être un dispositif obligatoire s’appliquant d’office dans toutes les zones tendues, soit plus de 1 100 communes, il est devenu facultatif et expérimental, un bilan devant être réalisé d’ici 2023. Autrement dit, sa mise en œuvre dépend de la volonté des élus locaux, indépendamment de la tension locative pouvant être constatée sur le terrain. Une inégalité pour des centaines de milliers de locataires, lesquels seront privés d’une protection nécessaire contre les abus de certains bailleurs.
Suite aux élections municipales de cet été, plusieurs agglomérations se sont manifestées pour mettre en place l’encadrement des loyers sur tout ou partie de leur territoire, telles Lyon, Montpellier ou Bordeaux. La preuve que le sujet est très clivant politiquement et que ces démonstrations d’intérêt résultent d’une alternance dans l’équipe municipale.
Si nous ne pouvons que nous féliciter de voir ce dispositif s’étendre à d’autres villes, il n’en demeure pas moins que sa limitation dans le temps constitue un non-sens absolu : observer les loyers dans les zones tendues sur une période de cinq ans, comme cela est prévu, aboutira à un résultat on ne peut plus prévisible, à savoir une augmentation des prix et la nécessité de limiter les excès. Dans un communiqué de presse d’août dernier, l’OLAP indiquait que les niveaux des hausses des loyers pratiquées en 2019 sur Paris « illustraient la tension sous-jacente du marché locatif privé » mais que ces résultats étaient modérés « par l’impact du décret annuel de limitation de la hausse des loyers, et, pour Paris, de l’arrêté d’encadrement, les augmentations globales restant inférieures à celles de la période d’avant 2014 ». Le dispositif d’encadrement des loyers est donc efficace et participe à la modération des prix, comme cela avait toujours été son objectif.
Attendre le bilan de l’expérimentation en 2023, c’est sacrifier des locataires et porter encore davantage atteinte, non seulement au pouvoir d‘achat, mais également à la mixité sociale. Tant prônée par les pouvoirs publics, celle-ci est pourtant de plus en plus remise en cause avec le départ des centres urbains vers la périphérie des ménages aux revenus moyens, trop riches pour le logement social, mais trop pauvres pour le secteur privé. De plus, l’encadrement des loyers ayant commencé à des dates différentes selon les agglomérations, nous n’aurons pas en 2023 les 5 années de recul souhaitées par les pouvoirs publics pour en dresser le bilan.
Alors même que l’on ne cesse de promouvoir la démocratie participative, pourquoi ne pas permettre l’organisation de référendums locaux afin que les habitants puissent demander la mise en place de l’encadrement des loyers ? Après tout, des initiatives similaires sont organisées dans d’autres pays, aux États-Unis dans l’État de Californie par exemple.
Enfin, l’encadrement des loyers devait s’appliquer à l’ensemble de l’agglomération parisienne, soit plus de 400 communes, l’arrêté à cet effet avait été publié en 2016. Par sa réforme, la loi ELAN a rendu impossible cette mesure, avec comme conséquence des situations aberrantes, certains loyers de communes de la première couronne étant supérieurs à ceux de l’arrondissement parisien limitrophe.
C’est pourquoi nous demandons :
- La pérennisation de l’encadrement des loyers ou, a minima, que le point de départ du délai de 5 ans soit celui de la mise en place du dispositif au niveau local ;
- La possibilité d’organiser des référendums locaux pour la mise en place de l’encadrement des loyers ;
- Que l’encadrement des loyers soit effectif sur l’ensemble de l’agglomération parisienne, comme cela devait être le cas.