Les incompréhensions face aux augmentations des prix du gaz et de l’électricité, la question du nucléaire qui ressurgit avec les graves incidents de la centrale de Fukushima, les mobilisations citoyennes sur les projets d’exploitation des gaz et huiles de schiste sont différentes facettes d’une même question : celle de notre modèle énergétique.
Or, sur cette question qui est un choix de société fondamental, le débat a trop longtemps été capté par les experts. Les débats nationaux précédents n’ont pas permis d’associer le grand public. Cette situation ne correspond plus aux exigences de notre société, plus informée et désireuse de participer aux choix qui la concerne, et conduit au sentiment diffus que tout n’est pas dit, que les instances chargées de surveiller et d’informer sont juges et parties, suscitant alors un sentiment de défiance et un risque de rejet de toute innovation.
Face à cette situation que la CLCV constate de plus en plus sur le terrain, nous demandons l’organisation d’un débat national sur notre modèle énergétique. Il devra être décentralisé au plus près des consommateurs, usagers et citoyens.
Parmi les pistes de réflexion à porter au débat, la CLCV avance l’urgence d’inverser les logiques économiques et de substituer aux politiques publiques visant à formater la demande à l’offre produite, une politique partant des besoins réels, redéfinis en mettant la priorité sur l’efficacité énergétique et en fournissant aux consommateurs et aux différentes catégories d’usagers les outils pour connaître, maitriser et réduire leur consommation.
En ce qui concerne les gaz et huiles de schiste - dont certains permis d’exploration ont été accordés dans la plus grande discrétion - la mobilisation des habitants, mais aussi des collectivités et des acteurs économiques locaux, a forcé le gouvernement à geler toutes les opérations de forage et d’exploration en cours. La CLCV demande à ce sujet que la Commission Nationale du Débat Public soit saisie pour organiser un débat national associant le grand public et tourné vers la mobilisation nécessaire à l’adaptation concrète de la société aux changements climatiques et à sa préparation à la raréfaction des énergies fossiles. Le code minier doit en outre être modifié pour permettre la participation effective du public en amont de toute décision (enquête publique préalable au permis de recherche). Les droits des riverains et des propriétaires de terrains doivent être mieux pris en compte (en restreignant notamment les droits d’occupation et de servitudes sur les propriétés privées accordés aux industriels).
Dans l’immédiat, trois décisions préalables devraient être prises :
- Concernant les gaz et huiles de schiste, l’arrêt de toute opération d’exploration et d’exploitation dans l’état actuel des technologies et un positionnement définitif après les conclusions d’un débat public loyal et non d’une commission d’experts ;
- La fermeture pour des raisons de sécurité de la centrale nucléaire de Fessenheim, construite selon des normes de sismicité qui ne sont plus à l'ordre du jour ;
- Garantir l’accès économique pour tous les consommateurs aux services essentiels dont font partie les énergies. Il s’agit de remplacer les dispositifs de « tarification sociale » stigmatisants qui ont montré leur inefficacité, par un retour au droit commun, en réformant les grilles tarifaires élaborées il y des décennies dans un contexte économique et social fort différent, et en revalorisant les aides au logement afin de solvabiliser les ménages qui en ont le plus besoin. Ces mesures ne doivent pas se limiter à l’électricité et au gaz naturel, mais être étendues au gaz butane et propane et aux réseaux de chaleur.