Malgré des mots qui peuvent paraître rassurants, l’absence d’informations sur les modalités de financement du fonds national des aides à la pierre inquiète l’ensemble des acteurs du logement social.

En effet, Sylvia Pinel et Christian Eckert ont rappelé, le 3 septembre dernier, que « les aides à la pierre demeurent essentielles pour soutenir la construction de logements sociaux. Elles seront maintenues ». Pour autant, les modalités d’abondement de ce fonds n’ont pas été précisées et les premiers échos laissent supposer que la part des aides directes de l’Etat pourrait diminuer en 2016. Si pour la CLCV ce fonds représente une réelle opportunité en matière de transparence, notamment par l’introduction d’une gouvernance partagée Etat / bailleurs / collectivités - et qui pourrait associer les locataires -, sa création ne doit pas avoir pour unique objectif de rendre progressivement plus autonome le financement des opérations Hlm.

La CLCV souhaite donc que le gouvernement indique clairement sa position sur les points suivants :

- La constitution du fonds national des aides à la pierre implique-t-elle une diminution des aides directes inscrites au budget de l’Etat ?

- Cette recherche d’optimisation des financements, certes légitime, garantit-elle la protection des locataires Hlm qui ne doivent pas financer seuls, avec leurs loyers, la construction de logements sociaux ?

Comme le prouve l’analyse des rapports de la MIILOS que la CLCV a mis en ligne, des économies sont possibles du côté des bailleurs (gestion plus saine, augmentation de la productivité, etc.). 

• Par ailleurs, la remise en cause régulière des aides aux logements[1] nourrit un climat délétère. Alors même que les aides à la personne sont placées au premier rang des priorités des Français[2], certains rapports préconisent de resserrer les critères d’éligibilité. Ils tendent également à opposer locataires Hlm et locataires du parc privé. La Cour des comptes, dont le dernier rapport soulève de nombreuses inquiétudes, souligne ainsi que les premiers bénéficieraient d’un avantage vis-à-vis des locataires du parc privé les plus précaires, ce qui interroge la CLCV :

- Les termes du débat, opposant deux catégories de locataires, sont mal posés. Les locataires du parc Hlm bénéficient, certes, d’un filet social de protection, mais les considérer comme des privilégiés serait une grave erreur.

- On estime que 50 à 80 % des aides versées aux locataires du parc privé auraient été absorbées en hausse de loyer.

L’enjeu n’est-il donc pas plutôt de travailler sur ces captations par les bailleurs privés et de développer une offre de logement correspondant aux besoins de ces locataires les plus précaires ?

• Pour la CLCV, l’enjeu central est celui de l’accès au logement social.

La région qui accueille le Congrès cette année témoigne de ce problème d’accès au logement social. Même si le taux d’équipement est supérieur dans les villes-centres des agglomérations, le parc social représente environ 10 % des résidences principales du Languedoc-Roussillon ; une moyenne très inférieure aux 16 à 17 % de la moyenne nationale. A l’inverse, plus de 36 % des ménages du territoire sont éligibles au PLAI, la catégorie de logements sociaux habituellement réservée aux publics les plus précaires. Face au manque de logements sociaux, ces ménages se retrouvent contraints de trouver un logement dans le parc privé et doivent consentir des efforts plus importants, voire accepter des situations de sur-occupation. Les réformes successives des politiques d’attribution n’apportent qu’une réponse partielle. La cotation de la demande (classement en fonction de critères établis sur le territoire) n’a de sens qu’en zone tendue. Elle permet uniquement de traiter les demandes en fonction de l’urgence et de définir les plus prioritaires parmi les prioritaires.

• L’accroissement de la production représente le cœur du problème et les réflexions doivent notamment porter sur l’accès au foncier.

En effet, le constat dressé par le CLCV est sans ambiguïté : le coût du foncier pèse de plus en plus lourd dans les projets de constructions de logements. Cela peut certainement s’expliquer par la rareté du foncier sur certains territoires, mais cela ne signifie pas, pour autant, qu’il n’en existe pas de mobilisable. L’Etat et les acteurs publics doivent donc travailler sur les leviers. Il est également primordial de fournir aux Etablissements publics fonciers (EPF) les moyens de leur action. A titre d’exemple, l'EPF du Languedoc-Roussillon a été créé en 2008 pour développer une offre de logements accessible aux populations modestes. Il bénéficie aujourd’hui d’une dotation bien inférieure à celle de son voisin, l’EPF PACA, alors que les besoins sont aussi importants.



[1] Rapport d’évaluation de la politique du logement (CGEDD, IGAS, IGF), Rapport de la Cour des comptes sur les aides personnelles au logement, etc.

[2] CREDOC, Les français et leurs attentes en matière de politique de logement, novembre 2014.