C’est l’ONIAM [1], établissement public sous la tutelle du ministère de la Santé, qui sera chargé d’évaluer les préjudices et demandera sur cette base aux laboratoires Servier de proposer une offre indemnitaire. En cas de refus ou d’offre insuffisante de Servier, il est prévu que l’état prenne en charge l’indemnisation et se retourne ensuite contre la firme pharmaceutique pour obtenir devant le juge le remboursement des sommes assorties de pénalités de 30 %.
Compte tenu du comportement fort peu coopératif des laboratoires Servier depuis le début de l’affaire, on peut craindre que les refus d’indemnisation ne manquent pas. Comme dans d’autres scandales de santé publique, ce sont donc bien les contribuables qui risquent au final d’assumer les coûts d’un dommage collectif causé par un professionnel. Cette situation anormale et choquante résulte de l’absence en droit français et européen d’une action de groupe, outil juridique qui, dans les litiges de masse, permettrait aux victimes de faire valoir leur droit à réparation dans des délais raisonnables.
Pour l’heure et dans l’intérêt des victimes, il est essentiel que le fonds permette à chacune d’elle d’obtenir, dans des conditions acceptables, une réparation suffisante de l’intégralité des préjudices subis. Ce principe devra être inscrit explicitement dans la loi mettant en place le fonds Mediator.
La CLCV considère que les victimes se tournant vers le fonds devront avoir la possibilité d’être assistées par des professionnels compétents, qu’il s’agisse de médecins conseils ou d’avocats. Nous sommes par ailleurs très réservés sur les dispositions prévoyant un simple examen sur pièces pour les dossiers réputés « moins complexes ». Nous craignons qu’au motif de gagner du temps, on ne mette en place des procédures d’expertise par trop expéditives qui seront défavorables aux victimes. Il convient au contraire de mobiliser des moyens suffisants pour une expertise approfondie de l’ensemble des dossiers.
Concernant le montant des indemnisations, le barème de l’ONIAM, qui est proposé comme référence pour le fonds « Mediator », est notoirement sous-évalué par rapport aux décisions des tribunaux civils. Nous allons donc au-devant d’une indemnisation inéquitable avec des montants plus élevés pour les victimes qui auront les moyens et la persévérance d’engager une action en justice et des sommes inférieures pour celles qui, faute de mieux, opteront pour le fonds « Mediator ». La CLCV se mobilisera donc dans les prochaines semaines auprès des parlementaires pour demander une réévaluation des barèmes indemnitaires.