Accusée de tous les maux pendant les débats parlementaires, ses détracteurs ont trouvé en elle une victime expiatoire toute désignée pour expliquer les mauvais chiffres de la construction. En effet, la perspective d’un plafonnement des loyers et de la mise en place d’une garantie universelle des loyers (GUL) aurait rendu les bailleurs extrêmement frileux, lesquels y réfléchiraient à deux fois avant d’investir dans le locatif…
Il est intéressant de noter que les plus ardents détracteurs de la loi ALUR sont principalement les fédérations professionnelles de l’immobilier. Rappelons que ce même texte plafonne les frais d’agence récupérables auprès des locataires. De là à dire que cette mesure a eu une incidence sur la construction, il y a un pas que personne n’a eu la décence de franchir, du moins publiquement. De même, GALIAN, assureur des professionnels de l’immobilier et l’un des plus farouches opposant à la GUL, vient de publier des chiffres 2013 très bons (1). L’opposition de ce groupe à la garantie universelle des loyers résulte davantage d’un choix stratégique financier que d’une simple préoccupation sur l’état du marché de la construction. Il serait donc temps qu’en matière de loi ALUR, les usagers (propriétaires ou locataires) soient écoutés car, in fine, c’est d’eux qu’il s’agit.
Les mauvais chiffres de la construction peuvent s’expliquer de différentes façons. La faible disponibilité du foncier dans les zones tendues constitue un premier frein ; son coût, un second. Ainsi, le prix du foncier a augmenté de plus de 550 % de 1982 à 2012. Dans les zones tendues, le foncier absorbe entre 33 % et 50 % du coût de sortie d’un logement (2). Et la baisse du pouvoir d’achat des ménages est loin d’arranger les choses. De fait, le coût d’un logement est devenu inabordable pour bon nombre de personnes et ce, depuis des années. En conséquence, il est évident que les ménages qui n’ont pas ou peu de moyens n’investissent pas. Il est dommage que cette problématique du foncier, pourtant centrale selon nous dans ce débat, soit quasiment absent et que d’aucuns préfèrent se rabattre sur la loi ALUR, cible bien plus facile.
Il est temps que des mesures concrètes soient prises. Le choc de simplification annoncé en matière de construction est intéressant, mais encore faut-il que l’économie espérée soit réellement répercutée auprès du consommateur et non « absorbée » par les professionnels. Les débats liés à la répercussion du taux de TVA réduit dans les restaurants est là pour nous le rappeler. La possibilité de dissocier le logement du foncier ou la mise en place d’un réel observatoire du coût du foncier, afin de connaître plus précisément l’évolution de ce marché et mettre fin à des opérations spéculatives, doivent, selon nous, être mises en place sans délai. Par ailleurs, il serait pertinent d’avoir un bilan des actions menées par les établissements publics fonciers et de connaître leurs projets d’actions.
1 Selon l’Argus de l’assurance, Galian a navigué à « contre-courant en 2013 » malgré un marché immobilier en manque de dynamisme : un chiffre d’affaire en croissance de 3,8% (39,083 M€) et un résultat net en hausse de 44% (8,6 M€).
2 Terra Nova - Des logements trop chers en France, une stratégie pour la baisse des prix (22 avril 2014).