Nous avons souhaité examiner la part des abonnements d’eau et d’assainissement dans la facture totale, celle des taxes et redevances, et le coût réel de l'assainissement non collectif souvent minoré. Cette analyse qualitative porte sur 150 factures de 2017 et 2018 correspondant à une année civile complète (soit près de 300 factures semestrielles), provenant de 178 services (89 services en régie et 89 Délégations de Services Publics), dans 50 départements, représentant 8,3 millions d'usagers.
Les principaux enseignements
Encore de fortes inégalités entre les usagers des différents services d'eau et d'assainissement
* Les prix au mètre cube, abonnements et taxes compris, sur la base des consommations réelles, concernant l'eau distribuée et l'assainissement, tels que perçus par les usagers à partir de leur propre facture :
* Des abonnements parfois très élevés pour l’eau et l’assainissement, qui vont à l’encontre de la mise en œuvre du droit à l'eau effectif pour tous et d’une consommation responsable de la ressource. 58€ est le montant moyen annuel des abonnements eau et assainissement, avec une fourchette allant de 0 à 156,39€ par an, sans avoir consommé la moindre goutte d'eau.
* Une tarification progressive très disparate, qui ne représente encore que 14% de notre panel de factures.
* La taxation de l’eau (taxes et redevances) toujours aussi inéquitable pour les ménages, qui met en cause le principe « de l'eau paie l'eau ». En moyenne, la part des taxes et redevances représente 16% des factures analysées.
* Une redevance de contrôle périodique des installations d'Assainissement Non Collectif parfois exorbitante et illégale. Ce montant peut aller sur 10 ans, de 50€ à plus de 600 € ; la moyenne nationale étant de 85€ en 2017.
* Une présentation des factures qui doit encore s’améliorer pour les usagers.
* La nécessité d'une réorganisation des services, en application de la loi NOTRe, à mettre en place dans la transparence et la concertation avec les usagers.
* L'information de l'ensemble des usagers sur le prix et la qualité de l'eau, la gestion des services, la transmission des rapports annuels, et la concertation locale avec les usagers sont encore très peu développées. A noter que les 11 millions d'usagers vivant en habitat collectif (locataires et copropriétaires), non abonnés directement aux services d'eau et d'assainissement sont encore très rarement destinataires des informations pourtant obligatoires.
3 recommandations prioritaires
Pour rendre effectif un égal à accès à l'eau et à l'assainissement pour tous, la CLCV propose trois mesures prioritaires :
Revenir aux principes
* retour au principe de l'eau paye l'eau, et la stricte application du principe « redevance due pour service rendu » ;
* application équitable du principe pollueur-payeur, qui réduira significativement la contribution des ménages ;
* affectation d'une part des fonds structurels européens gérés par les régions, à l'amélioration de la distribution de l'eau et à l'assainissement collectif et non collectif et à la réduction des coûts pour les usagers, en simplifiant l'instruction des dossiers et en associant les usagers à la définition des projets par les Collectivités ;
Redéfinir les structures tarifaires et la fiscalité
- application d'une tarification progressive juste et équilibrée, avec des critères harmonisés ;
- suppression des frais d'accès aux services, d'ouverture et fermeture des compteurs ;
- réduction de la TVA sur l'assainissement collectif de 10 à 5 %, comme pour l'eau, et la suppression de la TVA sur les taxes et redevances ;
- abandon des prestations d'affacturage par un prestataire qui existe encore en habitat collectif, ce qui impose une TVA de 20 % sur l'eau ;
- affectation d'une part des redevances à la modernisation des réseaux privés et au remplacement des équipements vétustes des ménages.
Développer la gestion participative
Cela nécessité la généralisation des Commissions Consultatives des Services Publics Locaux, sans seuil de population afin de :
- consulter les usagers, et mieux les informer ;
- les associer à la définition et à l'amélioration de la qualité des services ;
- garantir la transparence sur la réalité économique de tous les coûts ;
- organiser le débat public local, notamment à partir du Rapport Annuel sur le Prix et la Qualité des Services, destiné à l'information du public.
Retrouvez notre enquête complète : Enquête_CLCV_Les_dessous_de_la_facture_deau_mars_2019_.pdf722.71 KB
Crédit Photo : Pixabay