L’article 5 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période précise :
« Lorsqu'une convention ne peut être résiliée que durant une période déterminée ou qu'elle est renouvelée en l'absence de dénonciation dans un délai déterminé, cette période ou ce délai sont prolongés s'ils expirent durant la période définie au I de l'article 1er, de deux mois après la fin de cette période. »
Et le I de l’article 1er de la même ordonne d’indiquer :
« I. ‒ Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus. »
Or, le bail est précisément une convention ne pouvant être résiliée, du point de vue du propriétaire, que pendant un délai déterminé. Il s’ensuit donc la possibilité pour le bailleur de reporter dans le temps le congé dès lors que celui-ci devait être délivré entre le 12 mars et le 23 juin inclus.
Ainsi, pour tous les congés devant être délivrés dans cet intervalle le bailleur peut les notifier au plus tard dans les deux mois après la fin de cette période, soit jusqu’au 23 août 2020 inclus.
Le congé devant être notifié au moins 6 mois à l’avance, sont donc concernés les baux s’achevant entre le 12 septembre 2020 et le 23 décembre 2020.
La question se pose toutefois du respect du délai de préavis. Comme on peut le voir, le congé pourrait être valablement délivré sans que le propriétaire n’ait respecté le délai de préavis de 6 mois. Dans le cadre d’un bail s’achevant fin septembre par exemple, cela fait un mois de préavis environ si le bailleur notifie l’acte courant août… Or, si l’ordonnance du 25 mars 2020 ne suspend pas l’application des dispositions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 fixant le fameux délai de préavis, elle ne comprend pas pour autant de dispositions permettant un report du bail. Le Ministère de la Justice a cependant publié une note dans laquelle elle précise que la notification d‘un congé moins de 6 mois avant la fin du bail entraîne une prolongation d’autant du contrat de location.
De fait, le délai de préavis sera toujours de 6 mois, même si les dates seront décalées. Une interprétation des textes assez audacieuses puisqu’ils sont loin d’être aussi explicites sur un tel report de l’échéance du bail.
Cas pratique : un bail s’achevant le 30 septembre.
Normalement, le propriétaire devrait notifier au plus tard le congé le 30 mars. Nous sommes donc dans la période protégée permettant au bailleur de délivrer le congé jusqu’au 23 août. Le congé est envoyé le 3 août et le locataire le reçoit le 6 août. Le congé est valable car délivré durant la période définie par l’ordonnance du 25 mars 2020. Mais il faut que le locataire bénéficie du délai de préavis de 6 mois. En conséquence, le contrat ne s’achèvera pas le 30 septembre, qui était la date initiale, mais le 6 février 2021, soit 6 mois après la notification du congé. La période comprise entre le 30 septembre et le 6 février est analysée par le Ministère de la justice comme « une prorogation temporaire du contrat ».
A jour de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions et de l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d'urgence sanitaire.
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