Ces dernières années, l’engouement pour les compléments alimentaires n’a pas faibli. D’après le Credoc, 15,8 % des adultes consomment des compléments alimentaires en France. Un succès juteux pour les entreprises qui les produisent puisque, d’après les derniers chiffres publiés par le Syndicat national des compléments alimentaires (Synadiet), le marché des compléments alimentaires atteignait, en 2015, 1,54 milliard d'euros.
Preuve scientifique nécessaire
Même si les compléments alimentaires sont essentiellement vendus sous forme de doses (gélules, pastilles, ampoules…), ils font avant tout partie des denrées alimentaires. Et à ce titre, les fabricants, s’ils veulent revendiquer un effet santé, doivent faire évaluer et valider leurs dossiers scientifiques par l’Agence européenne de sécurité alimentaire (EFSA).
Mais le précieux sésame n’est pas facile à obtenir. En effet, il faut pouvoir apporter la preuve scientifique des effets sur la santé que l’on revendique. Sur les milliers de demandes des industriels parvenues à la Commission européenne, seules 242 allégations santé sont pour l’instant autorisées. Les fabricants peuvent, par exemple, indiquer sur un emballage que « le magnésium contribue à réduire la fatigue » ou que « la vitamine D contribue au fonctionnement normal du système immunitaire ».
En revanche, lorsque les produits ou les constituants sont retoqués, c’en est fini de la publicité sur un lien entre cranberry et santé urinaire ou entre probiotiques et immunité sur les boîtes des compléments alimentaires.
Contourner les règles
Le manque à gagner est tel que certaines marques cherchent à contourner les règles. Comment ? En déclarant leurs produits, non plus comme des compléments alimentaires, mais comme des dispositifs médicaux. En effet, malgré la présence rassurante du terme « médical », le statut de cette catégorie est beaucoup plus souple ! En particulier, la communication est simplement soumise à la réglementation de droit commun de la publicité et non au règlement européen sur les allégations.
C’est ce qu’ont fait les fabricants de divers produits minceurs pour pouvoir continuer à claironner sans preuve « aide à la perte de poids » ou « élimine les graisses ».
C’est ce qu’a fait aussi Juvamine, le leader des compléments alimentaires en grande-surface, en lançant un dispositif médical « Infections Urinaires » au cranberry. L’objectif annoncé, en toute légalité, est de traiter les infections urinaires de la vessie et de prévenir les infections urinaires et les cystites récurrentes, alors qu’aucune allégation de santé portant sur le cranberry n’a été autorisée dans l’Union européenne. En parallèle, la marque continue à vendre son habituel complément alimentaire au cranberry pour ne pas déstabiliser les clients fidèles. Mais bien sûr, dans un emballage vierge de toute revendication de bienfaits pour la santé.
Ce tour de passe-passe semblant concerner plusieurs produits en Europe, la CLCV a signalé cette dérive aux autorités compétentes.