Les OGM, leur utilisation ou leur intérêt font régulièrement débat en Europe et alimentent de nombreuses discussions. Les industriels des biotechnologies prêtent mille vertus aux plantes transgéniques. Par contre, pour les ONG environnementales, au contraire, elles constituent un danger. Quant aux consommateurs européens, ils restent pour l’instant majoritairement opposés à leur consommation.
Si le sujet est éminemment politique, il interroge aussi la communauté scientifique.
C’est pourquoi des chercheurs de l’INRA (Institut Nationale de la Recherche Agronomique) ont décidé de s’intéresser aux liens d’intérêt entre les recherches sur les plantes génétiquement modifiées et les principales industries qui développent et commercialisent ces plantes (Monsanto, Syngenta, Dow AgroSciences et DuPont Pioneer). Pour cela, ils ont analysés plus de 500 articles sur les plantes OGM Bt publiés entre 1991 et 2015 dans des journaux scientifiques à comité de lecture. Ces plantes transgéniques (principalement du maïs, mais aussi du coton et du soja) produisent des protéines d'une bactérie, Bacillus thuringiensis (d’où Bt), toxiques contre des insectes qui les infestent.
D’après les résultats parus dans la revue PLOS ONE(*) du 15 décembre 2016, 40% des publications sur ce sujet présentent un conflit d'intérêt financier car les études présentées dans ces publications ont été menées ou financées, entièrement ou en partie, par les industries de biotechnologies qui développent et vendent ces plantes.
Autre point souligné par ces scientifiques, pour les publications présentant un conflit d’intérêt, les conclusions sont plus fréquemment favorables aux intérêts des industries semencières (+50%) que pour celles sans conflit d’intérêt.
Cependant, ils reconnaissent que les analyses menées ne permettent pas de déterminer si les conflits d'intérêt financiers sont la cause de la plus grande fréquence de conclusions favorables aux intérêts des industries de biotechnologies.
C’est pourquoi les auteurs de l’article encouragent les revues scientifiques à explicitement faire état des conflits d'intérêt financiers présents dans les études. Ils proposent également, pour éviter ces conflits, de mettre en place un fond de recherche qui, tout en étant financièrement abondé par les industries concernées, en serait indépendant lors du choix des études à financer.
Ils reprennent ainsi une proposition faite depuis plusieurs années par la CLCV. En effet, régulièrement, nous avons interpellé les autorités nationales et européennes afin que soit institué un fond géré par les pouvoirs publics et abondé par des redevances payées par les firmes souhaitant commercialiser des OGM. Le choix des travaux de recherche à mener étant quant à lui confié à des instituts de recherche ou des agences d’Etat. Un tel dispositif permettrait enfin d’assurer une étanchéité entre le financement et la réalisation d’études qui restent trop souvent sous la dépendance étroite des professionnels de l’agro-industrie ou de la grande distribution.
(*) Guillemaud T, Lombaert E, Bourguet D (2016) Conflicts of Interest in GM Bt Crop Efficacy and Durability Studies. PLoS ONE 11(12): e0167777. doi:10.1371/journal.pone.0167777
Source Service de presse INRA
Plusieurs projets scientifiques portant sur les risques environnementaux et sanitaires liés aux OGM sont en cours au niveau européen. Pluridisciplinaires, ils affichent une volonté de transparence. Par exemple, le projet français, baptisé OGM90plus, est financé par le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie dans le cadre du programme RiskOGM. Il réunit un consortium composé de l’INRA, de l’INSERM, d’universités (Toulouse, Rennes 1, Paris Descartes, Bordeaux, Lyon) et de l’ANSES.