Verba volant, scripta manent. Traduction de cette expression latine : si les paroles s’envolent, les écrits restent. Mais, qu’est-ce qu’un « écrit » ?

Cette question ne se posait pas il y a quelques décennies : quand bien même certaines preuves peuvent être apportées par tout moyen (témoignage…) le document écrit constituait souvent la panacée et sa définition ne posait aucun problème car, tout le monde sait ce qu’est un document écrit. Cela va de la facture remise par un professionnel à un contrat lu et paraphé par les différentes parties. Le document existe matériellement (chacun dispose de son exemplaire du contrat, par exemple) et sa recevabilité en tant que preuve est une évidence puisque cette matérialisation confirme son existence même. Mais tout cela, c’était avant l’ère informatique et la dématérialisation des documents…

Qu’est-ce qu’une preuve écrite ?

Le législateur a défini la preuve par écrit comme celle résultant « d'une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission ». La définition, extrêmement large, vise surtout n’importe quel mode de transmission.

Et le législateur de préciser que « l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ».

Le principe est donc clair : la preuve électronique est au même rang que le document écrit. Mais il est nécessaire que l’identité de l’auteur soit certaine et que le document ne puisse faire l’objet de modification.

Comment utiliser la preuve informatique ?

La preuve informatique peut être utilisée pour montrer la validité d’un accord entre deux personnes (conclusion d‘un contrat…). Pour certains documents, des procédures d’identifications complexes existent également. Elles peuvent nécessiter un certificat d’authenticité afin de garantir l’identité « électronique » des intervenants (logiciel à télécharger sur l’ordinateur avec mot de passe spécifique…) et l’impossibilité de modifier toute pièce transmise. On parle alors de signature électronique, de coffre-fort électronique… A titre d’exemple, lorsque vous déclarez vos impôts sur Internet, il est parfois demandé certaines informations permettant de s’assurer que vous êtes bien le déclarant et le reçu de l’administration fiscale contient un numéro spécifique vous assurant qu’elle en est bien l’auteur. De fait, ce document pourra être utilisé si l’on vous reproche de ne pas avoir effectué votre déclaration à temps.

Dans ces cas, la preuve électronique, telle qu’elle est encadrée, ne pose pas de problème. Le souci  concerne la possibilité d’utiliser comme preuve tout écrit électronique.

Un simple mail peut-il ainsi faire office de preuve pour établir la réalité d’un fait, d’une discussion, d’un accord ? La réponse est non.

En effet, l’équivalence de la preuve électronique par rapport une preuve écrite classique réside dans la certitude de son auteur et dans l’impossibilité de modifier le document. Or, un simple mail ne répond pas à ces conditions, son contenu pouvant être facilement modifié et toute personne pouvant usurper, ne serait-ce que temporairement, l’ordinateur d’autrui. Cela ne signifie pas pour autant que ce document est sans valeur. Il peut constituer ce que l’on nomme un commencement de preuve de sorte que si le fait est confirmé par d’autres moyens (témoignages, par exemple), le juge disposera de suffisamment d’éléments pour apprécier ou non la validité de la demande.

En conclusion

Si la preuve électronique est effectivement admise en droit français, ce n’est que dans des conditions bien précises et strictes afin que l’identité des personnes concernées et le contenu du document soient garantis. En revanche, le simple échange de mails est insuffisant en soi et doit être complété par d’autres éléments afin d’établir la réalité d’un fait ou d’un acte.