Que ce soit pour se déguiser ou faire comme les grandes, les petites filles adorent se maquiller. Les industriels l’ont bien compris… Et aujourd’hui, à côté des poupées et des jeux de société, le maquillage pour enfants s’est invité dans les rayons des magasins de jouets. Mais attention ce qui pourrait apparaître comme un jeu ne l’est pas. Fards à paupières, gloss ou vernis à ongles sont susceptibles de provoquer des allergies mais aussi de déposer sur la peau et les ongles des enfants des substances nocives telles que des perturbateurs endocriniens.
En 2015 et 2016, des opérations de rappels et retraits de la vente de palettes de maquillage pour enfants avaient été lancées en raison de la présence de métaux lourds ou de substances interdites. Fin 2018 et début 2019, les agents de la DGCCRF avaient d’ailleurs analysé 12 palettes de maquillage pour enfants pour se déguiser. 3 d’entre-elles contenaient de l’aluminium et de l'isophorone, au-delà des seuils.
La CLCV, en partenariat avec la première association de consommateurs suisse, la Fédération romande des consommateurs (FRC), rend publique son enquête sur 9 produits* estampillés enfants : 2 brillants à lèvres, 5 vernis et 2 mallettes de maquillage. Destinés aux enfants, nous pourrions croire que ce maquillage est plus sûr que celui des adultes… Le résultat de nos tests en laboratoire montrent que ce n’est pas toujours le cas.
Rouges et brillants à lèvres : les moutons noirs
Tous les rouges et brillants à lèvres/gloss contiennent des MOSH et MOAH, des huiles minérales issues du pétrole. Ces substances sont jugées préoccupantes pour la santé par les autorités de santé. Les MOSH sont en effet soupçonnés d’être bioaccumulables dans le foie et les MOAH seraient susceptibles d’être cancérigène.
Nos analyses en laboratoire montrent qu’ils contiennent jusqu’à 42 % de MOSH (brillant à lèvres de la malette Make it real). Un taux qui dépasse largement les doses (5 %) recommandées par l’association professionnelle européenne des industries cosmétiques, Cosmetics Europe. Ces résultats sont préoccupants car ces produits sont appliqués sur les lèvres et sont ingérés par l’enfant.
Vernis à ongles : peut mieux faire
Notre enquête a révélé que la majorité des vernis testés ne contient pas de solvants volatils, souvent remplacés par de l’eau. Un point positif à nuancer. 3 vernis sur 5 contiennent du phénoxyéthanol, un conservateur qui, à forte dose, peut avoir des effets sur le foie. En plus de cette substance, certains vernis ont des taux importants d’allergènes comme le vernis Miraculous Ladybug qui en cumule cinq. Dans un produit (Rêve de princesse - Ma manucure créative), on retrouve à la fois du phénoxyéthanol et des doses très élevées de styrène, potentiel perturbateur endocrinien.
Mallettes de maquillage : à éviter
Les mallettes de maquillages regroupent différents produits : de l’ombre à paupières, du gloss, du vernis ou encore du fard à joues. Les mallettes de notre échantillon présentent toutes et dans tous les produits du phénoxyéthanol. Ce conservateur a été jugé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) toxique le foie.
Nous avons trouvé dans les fards et vernis des traces de BHT, un potentiel perturbateur endocrinien, et de methylisothiazolinone (MIT), un allergène puissant. Mauvaise surprise supplémentaire, ces substances ne sont pas indiquées sur l’étiquette. Utilisé comme antioxydant, l’ANSES a proposé une évaluation des effets du BHT sur la santé au niveau européen.
Nos conseils aux parents
La peau d’un enfant est plus sensible que celle d’un adulte. Elle a moins de barrières protectrices. Résultat, le risque d’une réaction allergique est plus important. « Il faut attendre que la peau soit prête, soit capable de se défendre avant de porter du maquillage même pour enfant. Il est conseillé d’attendre la fin de la puberté » précise Isabelle Rousseaux, dermatologue et membre du Syndicat National des Dermatologues. « Si les petites filles se maquillent régulièrement en dehors d’évènements ponctuels comme une fête ou un anniversaire, elles risquent de se sensibiliser au maquillage et devenir allergiques », s’inquiète-t-elle. Elle rappelle qu’avec les allergènes de contact, il n’y a pas de désensibilisation possible, « une fois que l’on est allergique c’est pour la vie !»
Pour Isabelle Rousseaux, un seul mot d’ordre pour limiter les risques d’allergie et de santé : « le maquillage des enfants doit rester occasionnel et ne pas être appliqué aux plus jeunes. »
Elle conseille de :
- Privilégier le maquillage qui s’enlève à l’eau et le garder sur la peau le moins longtemps possible.
- Avant toute application sur la peau, de lire scrupuleusement les consignes d’utilisation et les avertissements indiqués sur l’emballage ou la notice.
- Démaquiller soigneusement la peau avec de l’eau et un savon doux ou un lait de toilette adapté à l’âge de l’enfant et appliquer ensuite une crème hydratante.
Comme de nombreux produits, notamment les compléments alimentaires, évitez d’acheter du maquillage pour enfants sur des sites internet étrangers, hors Union européenne car les normes sanitaires à respecter par les fabricants risquent d’être moins restrictives qu’en Europe.
Résultats
*Notre sélection ne reflète pas la totalité des produits sur le marché
Protocole de test
Trois catégories de substances ont été recherchées dans 9 boîtes de maquillage destinées aux enfants dès 3 ans : allergènes, potentiels perturbateurs endocriniens et substances suspectées cancérogènes.
Les tests se sont déroulés en deux temps. L’étiquette des produits a été analysée à l’aide de l’application FRC Cosmétiques de la Fédération romande des consommateurs. Pour juger le risque que courent les plus jeunes, le filtre « Enfant et adolescent (3-16 ans) » a été appliqué. Ensuite, les substances préoccupantes relevées ont été analysées en laboratoire.
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Crédit photo : © biker3 - stock.adobe.com
*Notre sélection ne reflète pas la totalité des produits sur le marché
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